Paradoxalement, les Français épargnent davantage en 2023 qu’avant la crise sanitaire, malgré le contexte inflationniste. Un phénomène qui s’explique par de nombreux facteurs. Décryptage.
18,1%. Selon la dernière note de conjoncture de l’Insee, il s’agit du probable taux d’épargne, c’est-à-dire le rapport entre l’argent que les Français mettent de côté et leurs revenus, pour l’année 2023.
De 15,1% avant la crise sanitaire à 18,1% en 2023
Un taux qui peut paraitre “étonnant”, reconnaît Julien Pouget, le chef du département conjoncture de l’institut statistiques. Car s’il est certes inférieur aux 20,9% et 19% enregistrés respectivement en 2020 et 2021, il dépasse de loin son niveau antérieur à la crise sanitaire : 15,1% en 2019, d’après l’Insee.
En revanche, pour Philippe Crevel, le directeur du Cercle de l'épargne, ce taux d’épargne de 18,1% en 2023 n’a rien d’une surprise. Selon lui, il n’est que le reflet “de la persistance d'un fort niveau d'inquiétude” des Français, causé par l’inflation. En effet, dans ce contexte, ceux-ci “préfèrent réduire leur consommation que de puiser dans leur épargne, car ils anticipent les hausses de prix à venir”, estime cet expert interrogé par le site d’information MoneyVox.
Un contexte inflationniste préoccupant qui booste l’épargne...
Par ailleurs, l'important taux d’épargne des ménages est également la preuve d’un vieillissement de la population, selon l’économiste. “Le poids des personnes de plus de 45 ans au sein de la population augmente ; or ces tranches d'âge sont celles qui préparent financièrement leur retraite en épargnant”. Et ce, par crainte, notamment, que le niveau de leur pension de retraite soit insuffisant pour faire face à leurs dépenses quotidiennes.
Une troisième cause peut, encore, expliquer pourquoi les Français préfèrent amasser de l’argent sur leurs livrets, plutôt que de consommer. Il s’agit de la hausse de la rémunération des produits d’épargne réglementée au 1er février.
… Tout comme les produits d’épargne réglementée plus rémunérateurs
En effet, le taux du Livret A, et de son cousin le livret de développement durable et solidaire (LDDS), est passé de 2 à 3% au 1er février. Et il pourrait même dépasser la barre des 4% au 1er août. Quant au Livret d’épargne populaire (LEP), il a vu sa rémunération presque tripler en un an, passant de 2,2% au 1er février 2022 à 6,1% au 1er février 2023. Ce qui fait de lui le seul placement “anti-inflation” sur le marché.
Enfin, pour expliquer cette forte propension à l’épargne en France, “d’autres facteurs anxiogènes sont également à prendre en compte comme la transition énergétique ou la situation géopolitique”, conclut Philippe Crevel. Toutefois, il admet que “les dépenses de consommation pourraient repartir à la hausse” en fin d’année, si l’inflation continue de ralentir, comme le prévoit l’Insee.