Une procédure de divorce est toujours une situation conflictuelle, notamment d'un point de vue patrimonial avec la dissolution de la communauté. Il existe cependant un certain nombre de précautions à prendre une fois la communauté dissoute, voire dès que la procédure est déclenchée, pour éviter de rencontrer de nouvelles situations de conflits après que le divorce ait été prononcé.
Dès que la procédure de divorce est enclenchée, il est important de faire le plus vite possible le point sur ses comptes bancaires, car l'argent placé à la banque est le plus souvent liquide et facilement récupérable par le conjoint.
Le compte le plus important est le compte joint. En effet, dans le cas où ce compte est intitulé " Monsieur OU Madame ", il présente deux co-titulaires et fonctionne indifféremment avec la signature de Monsieur ou Madame. Sur ce compte les co-titulaires sont responsables des dettes et prélèvements, tant qu'il n'y a pas eu d'ordonnance de non conciliation. Même si un retrait important d'un des conjoints entre l'engagement de la procédure de divorce et l'ordonnance de non conciliation pourrait être requalifié et réintégré, cela entrainera des conflits supplémentaires. Pour éviter ce type de situation, il faut demander à la banque de désolidariser le compte. Il fonctionnera alors comme un compte collectif sur lequel toute opération de débit exigera les deux signatures conjointes. Outre l'ordonnance de non conciliation sur le compte joint, il faut aussi demander à la banque de révoquer les éventuelles procurations sur le compte joint.
Autre source de conflit : les placements des enfants. Selon les principes généraux posés par le Code civil, les parents exercent en commun l'administration légale des biens de l'enfant sous la vigilance du juge des tutelles. Ainsi, en pratique, à condition d'exercer l'autorité parentale sur le jeune épargnant, chaque parent est libre d'ouvrir un compte ou livret au nom de leur enfant, et y verser ou retirer des fonds. L'accord de l'autre parent est alors présumé. Dans le cas de parents divorcés, avec le maintien de l'autorité parentale pour les deux parents, chacun peut alors effectuer un retrait sans l'accord de l'autre. Pour éviter les conflits entre parents, des dispositions particulières peuvent avoir été prises lors de l'ouverture du compte, par la banque ou par un parent, qui peuvent demander à ce que toutes les opérations nécessitent l'accord des deux parents. Si ce n'est pas le cas, il faut alors le demander à sa banque dès l'enclenchement de la procédure de divorce, pour éviter que le conjoint ne dilapide le capital placé pour les enfants.
Modifier les modalités de succession
La portée des donations que les époux se sont consenties pendant le mariage peut être remise en cause au moment du divorce. Mais tout dépend de la nature de la donation et de la législation à laquelle elle est soumise.
Les donations à venir (exemple donation au dernier vivant), sont automatiquement révoquées par le divorce, sauf volonté contraire des deux époux.
Par contre, les donations de biens présents suivent un autre régime. En effet, avant la réforme du 26 mai 2004 sur le divorce, les donations de biens présents consentis étaient révocables par leur donateur. La réforme a rendu irrévocables les donations de biens présents, mais cette reforme n'est pas applicables aux donations consenties avant 2005. Ces donations restent donc révocables. Il est donc tout à fait possible que lors du divorce, le conjoint demande le remboursement d'une donation d'un bien présent qu'il a consenti avant 2005.
Concernant l'assurance vie, il convient de vérifier comment le conjoint avait été désigné dans les contrats. Dans la plupart des cas, le souscripteur a indiqué la mention " mon conjoint, à défaut... ". Mais dans le cas où le conjoint est nommément désigné comme bénéficiaire du contrat, il faut modifier la clause bénéficiaire. Cependant, depuis le 1er janvier 2005, l'assurance vie souscrite entre époux, en tant que donation entre vifs de biens présents, est devenue irrévocable, en cas d'acceptation expresse ou tacite du bénéficiaire. Si le conjoint, nommément désigné comme bénéficiaire a accepté le bénéfice du contrat, l'assuré ne peut rien faire. Enfin, il est possible que le bénéficiaire a été à la fois désigné par le nom et par sa qualité. Par exemple : " Monsieur X, mon conjoint ". Il est nécessaire de modifier cette clause. Si le conjoint a déjà accepté le bénéfice du contrat, il faut demander au juge de révoquer cette acceptation pour la raison que Monsieur X n'est plus le conjoint. Le juge doit alors trancher. Compte tenu de la jurisprudence récente, il semblerait qu'il faille faire primer la qualité sur la désignation nominative. Cependant, plusieurs facteurs vont entrer en ligne de compte dans la décision du juge. Par exemple, une demande de révocation a plus de chances d'intervenir si l'assuré est à nouveau marié, ou s'il a indiqué " Mon conjoint, Monsieur X ", et non " Monsieur X, mon conjoint "
Le logement familial
Lors d'un divorce, les époux peuvent décider de vendre le logement et de se partager le prix, après paiement des éventuelles échéances d'emprunt y afférentes. Mais l'un d'eux peut également demander que le logement lui soit attribué, contre remboursement à son ex-conjoint de sa part sur le logement.
Envers l'établissement de crédit, les deux époux qui ont acheté ensemble restent co-emprunteurs sur le prêt. Pour que l'époux ayant conservé la propriété du logement, en rachetant la part de son conjoint, soit seul emprunteur sur le prêt, il doit en faire la demande auprès de l'établissement de crédit qui va alors procéder à la désolidarisation de celui ci. L'établissement prêteur va alors s'assurer que l'époux qui fait la demande de désolidarisation dispose de revenus suffisants pour assumer seul le remboursement des échéances.
Pendant toute la procédure de divorce, l'occupation du logement peut donner lieu au versement d'une indemnité dite "d'occupation". Selon la cour de cassation, l'indemnité d'occupation a pour objet de réparer le préjudice causé à l'indivision ou au conjoint propriétaire par la perte de loyers pendant la période de mise à disposition gratuite du logement, peu importe que l'époux concerné l'occupe effectivement ou non.
Pendant la procédure, tous les actes (vente, hypothèque, donation, mise en location, résiliation de la police d'assurance, etc.) portant sur le logement familial doivent être faits d'un commun accord par les deux époux. La nature propre, personnelle, commune ou indivise du logement n'entre pas en jeu. Dans le cas contraire, l'époux qui n'a pas consenti à l'acte peut demander son annulation. Sa demande doit être présentée dans l'année qui suit le jour où il en a eu connaissance, ou le jour de la dissolution définitive du mariage.
Le plus prudent est alors, pour l'époux qui n'a pas le logement de demander au juge :
- d'ordonner un état des lieux du logement et un inventaire du mobilier et du linge de maison ;
- d'indiquer qui sera tenu de payer jusqu'au prononcé du divorce : les échéances d'emprunt, les impôts, les factures d'eau, d'électricité, etc., car à défaut les organismes créanciers et banques s'adressent à l'époux le plus solvable.
Enfin, avant le prononcé du divorce, l'époux non propriétaire peut effectuer une demande de concession judiciaire à bail. Techniquement, l'époux qui est propriétaire du logement est alors forcé de consentir un bail à son ex-conjoint. Ce cas s'applique seulement lorsque les enfants ont leur résidence habituelle avec cet ex-conjoint et jusqu'à ce que le plus jeune atteigne la majorité.