Les règles de détermination des héritiers, ou " de dévolution légale ", ne s'appliquent que par défaut, c'est-à-dire en l'absence de dispositions particulières effectuées par le défunt. Le défunt peut alors avoir véritablement organisé sa succession, par exemple par le biais du testament. En effet, ce dernier permet de répartir de son vivant, tout ou partie de ses biens en faveur d'une ou plusieurs personnes.
Testament olographe ou authentique
Il existe deux principales formes de testament. Le testament olographe et le testament authentique. Le testament olographe est le plus pratiqué en France. Il présente l'avantage d'être simple, gratuit, et aisément modifiable ou révocable. C'est un testament écrit en entier, daté, et signé, de la main du testateur lui-même, sans qu'il ne soit assujetti à aucune autre forme.
De plus, il doit caractériser l'intention réelle du testateur de tester, c'est-à-dire d'établir un testament. Il est alors nécessaire de distinguer cette volonté d'un simple projet. S'il est écrit sur deux ou plusieurs feuillets, il faut qu'il existe un lien entre ces feuillets. Il faut donc numéroter toutes les feuilles, indiquer la date et signer chacune d'entre elles. Il s'agit d'un acte sous seing privé (écrit par une ou plusieurs parties sous leur seule signature, sans intervention d'un officier public).
Le risque du testament olographe tient donc essentiellement en une faculté de falsification, de perte ou de destruction. Le testament olographe fait foi de sa date jusqu'à preuve du contraire, et a la même force probatoire qu'un acte authentique. La charge de la preuve est donc inversée et c'est à celui qui conteste la date ou le contenu du testament olographe de prouver ses affirmations.
Le testament authentique est lui un testament reçu par un notaire, c'est-à-dire dicté au notaire en présence d'un autre notaire ou de deux témoins. Les conditions sont donc relativement lourdes. Le testateur est tenu de dicter le testament au notaire, qui écrit. Le testament authentique, comme le testament olographe, est donc nécessairement un acte écrit.
La jurisprudence refuse de permettre de suppléer à l'exigence de la dictée orale par des signes, un testament notarié ne peut donc, en l'état actuel du droit, pas être effectué par un testateur muet. La jurisprudence admet tout de même que le testateur puisse s'aider de notes écrites ou d'un projet établi à l'avance, pourvu qu'il en dicte les termes au notaire. De même, un non-francophone peut établir un testament notarié en France mais seulement si le notaire connaît sa langue, car il est interdit au testateur de se faire assister par un interprète. Le testament doit ensuite être signé par le notaire, les témoins ainsi que le testateur lui-même.
Comme pour le testament olographe, le testament notarié a la force probante, autrement dit il fait foi jusqu'à preuve contraire. Enfin, même si le testament oral n'est théoriquement pas admis, si le défunt a donné de son vivant, des instructions orales à ses héritiers et que ceux-ci sont d'accord pour les exécuter, le testament oral devient valable et obligatoire. Il crée ainsi l'obligation pour les héritiers de le respecter, et ce, sans limite dans le temps.
Par exemple, si une personne demande oralement à ses enfants de verser après sa mort une rente viagère à l'un de ses amis et que les enfants commencent à verser cette rente après le décès de leur parent, ils ne peuvent plus, par la suite, contester la validité du testament oral et cesser les versements. Ils sont tenus de poursuivre les versements jusqu'à leurs termes.
Les différentes formes de legs
Le legs universel est la disposition par laquelle le testateur donne à une ou plusieurs personnes la totalité des biens qu'il laissera à son décès. Le légataire universel a donc vocation à recueillir la totalité des biens. Si plusieurs personnes sont nommées légataires universels, elles se partagent les biens de la succession. Si l'une d'entre elles renonce à la succession, sa part reviendra aux autres. Mais le légataire universel ne reçoit pas forcement la totalité des biens de la succession.
En effet, le testateur ne peut pas disposer librement de " la réserve héréditaire ". Cette réserve successorale représente la part des biens et droits successoraux dont la loi assure la dévolution à certainshéritiers dits réservataires. Il s'agit donc d'une partie de la succession réservée à certains héritiers (qui ne peuvent donc pas se voir déshériter totalement). Ce même texte définit, par opposition, la notion de quotité disponible, qui est constituée des biens et droits successoraux qui ne sont pas réservés par la loi et dont le défunt peut disposer librement.
Le legs à titre universel est une autre forme de legs. C'est celui par lequel le testateur lègue une quote-part de ses biens. Par exemple, il peut léguer la moitié de ses biens, le tiers ou le quart, tous ses meubles ou tous ses immeubles, ou encore un certain pourcentage fixé de tous ses biens. Les biens ainsi légués ne sont pas décrits ni distingués objet par objet. Le légataire à titre universel est également tenu de payer les dettes de la succession proportionnellement à sa part.
Enfin, le legs particulier est le legs d'un ou plusieurs objets déterminés (une maison, un meuble, une somme d'argent, des titres...). Le légataire particulier reçoit l'objet dans l'état ou il se trouve au jour du décès du testateur, et ce même si la valeur de l'objet en question a subi des variations importantes entre le moment ou il a été rédigé le testament et le jour du décès (par exemple, une maison peut avoir été hypothéquée ou au contraire avoir été embellie). Contrairement aux autres légataires, le légataire particulier n'est pas tenu des dettes de la succession.
Lorsqu'un legs porte sur le solde d'un compte bancaire, le légataire doit recevoir le jour du décès le solde du compte c'est-à-dire les sommes y figurant diminuées des opérations en cours (virements, chèques, prélèvements). Mais si le défunt a reçu un trop perçu qu'il doit rendre (virement de retraite par exemple), il s'agit d'une dette de la succession auquel n'est pas tenu le légataire particulier.
Si son legs est un immeuble hypothéqué, il doit désintéresser les créanciers hypothécaires, mais peut se retourner contre la succession (les héritiers ou légataires universels) pour obtenir le remboursement des sommes payées.
Si le legs est un immeuble, les acquisitions, même contiguës à cet immeuble, faites par le défunt ne sont pas censées faire partie du legs. En revanche, si le legs est un terrain, les constructions nouvelles sont incluses dans le legs.
Les modalités d'exécution et de révocation
Lors de la rédaction du testament, il est possible de prévoir des modalités d'exécution des legs effectués. Il est ainsi possible de léguer ses biens sous réserve que le bénéficiaire remplisse certaines conditions. Par exemple, léguer un immeuble à quelqu'un à condition qu'il se charge de toutes les formalités de l'enterrement. Dans ce cas, si les conditions ne sont pas remplies, le legs sera révoqué.
La révocation signifie que le bénéficiaire devra restituer à la succession le ou les biens qu'il a recueilli(s) lors du décès du testateur. Cette révocation n'est cependant pas automatique et il est nécessaire qu'elle soit prononcée par un tribunal (Le Tribunal de grande Instance du lieu d'ouverture de la succession). Les juges déterminent alors si la charge non exécutée était pour le défunt la cause principale du legs (dans ce cas, ils prononcent la révocation) ou s'il s'agissait d'un simple souhait de sa part (il n'y a, dans ce cas, aucune sanction). Les juges déterminent également si la charge imposée a été ou non partiellement exécutée, autrement dit si la volonté du testateur a été suffisamment ou insuffisamment respectée.
De plus, il est possible pour le testateur d'inclure une clause d'inaliénabilité. Il s'agit d'une clause qui interdit au légataire de se dessaisir du bien légué. Pour être valable, cette clause doit être temporaire et être justifiée par un intérêt sérieux et légitime. Par exemple, lors d'un legs à plusieurs personnes, dont un mineur, une clause interdisant la vente du bien jusqu'à la majorité du mineur est valable. En revanche, toute clause interdisant indéfiniment la revente est nulle.
La durée doit en outre être en adéquation avec l'âge du donataire. En effet, un testament qui obligeait les légataires à conserver un immeuble pendant 30 ans s'est vu annulé car les légataires étaient âgés de 60 et 65 ans et la clause d'inaliénabilité atteignait alors leurs espérances de vie.
Après rédaction du testament, le testateur peut annuler à tout moment ses dispositions. Il est alors possible de réécrire autant de fois qu'on le désire des dispositions testamentaires. On peut également rédiger des testaments successifs en fonction des nouveaux biens qui rentrent dans le patrimoine.
Il existe deux révocations, d'une part la révocation expresse et d'autre part la révocation tacite. La révocation expresse peut intervenir soit dans une déclaration spéciale par acte notarié, soumise au même formalisme que le testament initial (présence de deux notaires, ou d'un notaire assisté de deux témoins), soit par une disposition expresse d'un nouveau testament.
Le second testament, pour pouvoir révoquer le premier, doit alors lui-même être valable, c'est-à-dire respecté l'ensemble des règles vue précédemment. Un testament olographe peut révoquer un testament authentique. La révocation d'un testament peut aussi se déduire de l'attitude du testateur. C'est ce qu'on appelle la révocation tacite.
Elle intervient lorsque le testateur a fait en sorte que l'exécution de son premier testament soit impossible. Par exemple, si un même bien a été dans un premier temps légué par testament, puis vendu par le testateur, le legs sera considéré comme révoqué.
Il est également possible de ne changer qu'une partie du testament (par exemple, changer uniquement le nom du légataire et conserver les autres dispositions). Il suffit dans ce cas de l'indiquer sur le nouvel acte et de préciser que les autres legs restent valables. Enfin, s'il existe deux testaments à l'ouverture d'une succession, que ces testaments sont tous deux valables et que le plus récent ne porte pas mention de la révocation du plus ancien, le notaire, ou éventuellement le tribunal saisi, comparera les deux écrits.
Si les deux testaments sont incompatibles entre eux (par exemple, lorsque les mêmes biens ont été légués à deux personnes différentes), seul le plus récent sera considéré comme valable et le plus ancien sera considéré comme tacitement révoqué. En revanche, si les deux testaments ne portent pas sur les mêmes biens et qu'ils ne sont pas incompatibles, ils seront tous les deux valables et leurs dispositions seront exécutées.