Véritable mine d’or pour les épargnants, gouffre financier pour l’Etat et les banques : les vieux plans d’épargne logement (PEL) sont dans le viseur de la Cour des comptes. Lundi, elle a en effet demandé à ce que la rémunération des PEL ouverts avant 2011 soit révisée.
En ouvrant un PEL aujourd’hui, cela vous rapporterait 1% d’intérêt à l’année, avant impôts et prélèvements sociaux. Pourtant, le rendement du PEL a connu des jours meilleurs. Notamment au milieu des années 1980 où il dépassait même les 4%. Aujourd'hui encore, quelques heureux épargnants n’ayant pas clôturé leur plan au terme du contrat profitent encore d'une rémunération très intéressante.
Les PEL souscrits avant la nouvelle règlementation de 2011, limitant à 15 ans la durée de vie des nouveaux PEL, bénéficient à vie du taux fixé à la signature du contrat. Une bénédiction pour les épargnants, mais un manque à gagner pour les banques et l’Etat.
Et c’est justement ce que pointe la Cour des comptes dans un rapport publié lundi 5 septembre. L'institution estime que « le PEL est détourné de l'objectif historique d'accession à la propriété pour devenir un produit d'épargne de long terme ».
Un avantage jugé “peu justifié et même disproportionné”
Parmi les détracteurs de ces vieux PEL, on retrouve les banques qui paient les intérêts des PEL. La Fédération bancaire française (FBF) juge pour sa part que « ces anciens PEL ne sont plus aujourd'hui en ligne avec le marché et constituent un coût important pour le financement de l'économie ».
« Si les PEL ouverts avant 2021 étaient rémunérés au taux en vigueur pour les nouveaux PEL, soit 1% (comme le Livret A au même moment), il en résulterait un gain de l'ordre de 3,9 milliards d'euros en matière de ressources pour le financement de l'économie française », révèle la Cour des comptes, en se basant sur les calculs de la Banque de France. Selon cette dernière, les PEL ouverts avant 2011 représentaient en 2021 environ 108 milliards d’euros, avec une rémunération moyenne de 4,5%, contre 3,04% pour l'ensemble des PEL.
Les banques ne sont pas les seules à perdre de l’argent, l’État aussi. Les PEL ouverts avant 2018 sont exonérés d'impôt sur le revenu jusqu'à leur treizième anniversaire et permettent éventuellement d’obtenir une prime d'État.
La Cour des comptes évalue à 411 millions d'euros le coût pour les finances publiques en 2022 pour ces vieux PEL. Et ce « sans que l'État ne retire aucun retour financier ni ne flèche la ressource vers des emplois d'intérêt général comme c'est le cas pour les livrets réglementés », souligne la Cour.
La Cour des comptes « recommande de réfléchir à un dispositif de suppression » de l'avantage des vieux PEL sur les autres produits d'épargne, qu'elle juge « peu justifié et même disproportionné ».
Quel avenir pour les vieux PEL ?
Pas de panique pour l’instant si vous êtes détenteur d’un PEL. Il paraît aujourd’hui juridiquement compliqué d’imposer une révision du taux à la baisse des vieux PEL aux titulaires, tout comme de limiter leur durée de vie.
Pour éviter des litiges entre les banques et leurs clients, la Cour des comptes imagine d'autres solutions. La première consiste en un accord mutuel permettant aux banques de clôturer les PEL, en échange du versement d’une indemnité pour le client. Dans la seconde option, il s’agirait de modifier les termes des contrats par la loi, au nom de l'intérêt général. En échange, les banques s’engageraient à financer des chantiers prioritaires, comme par exemple des projets en faveur de la transition écologique et énergétique.
Le ministre de l'Économie Bruno Le Maire a confirmé de son côté avoir « pris note » des recommandations de la juridiction. Pour le moment, il a simplement déclaré que le constat de la Cour sur les PEL « peut légitimement amener à s'interroger sur l'efficacité de l'allocation de cette épargne logement ».