Après des années de stabilisation, les taux d’intérêt se remettent à augmenter depuis le début de l’année. Les assureurs vie suivent de près la situation, laquelle pourrait affecter la liquidité de leurs fonds euros et entraîner des sorties massives. Face à cette éventualité, ils se montrent prudents et adaptent leur communication avec les clients.
Comme annoncé par les économistes en automne, l’inflation s’accélère en Europe et dans le monde depuis janvier. Sur les douze derniers mois, les prix ont augmenté de 5,2 %. Cette augmentation ne pèse pas seulement de manière directe sur le pouvoir d’achat des consommateurs. Elle se répercute également sur les taux d’intérêt.
Le taux d’emprunt de l’Obligation France à maturité 10 ans revient ainsi à 2,20 % mi-juin 2022, après être tombé jusqu’à -0,15 % fin 2020. Avantageuse à long terme, cette inversion de tendance expose les assureurs vie à un désintéressement des épargnants, qui seraient tentés de réinvestir leur argent dans des supports plus rémunérateurs.
Des assureurs prudents malgré les rachats contenus
Avec la remontée des taux d’intérêt, les épargnants s’attendent logiquement à une revalorisation du taux assurance vie par leur assureur. Ce serait mal connaître le fonctionnement des fonds euros et des contrats multisupports en général.
Les assureurs ne peuvent pas répercuter immédiatement les taux élevés du marché sur la rémunération de leurs engagements, puisque le capital engagé dans ces fonds a été investi dans des obligations plus anciennes, à plus faible rendement . Sur ce point, l’assurance-vie ne fonctionne pas comme le livret A et les autres livrets réglementés, dont la rémunération évolue en fonction de l’inflation. Cette différence inquiète les assureurs à juste titre :
ImportantLes analystes craignent que les épargnants rachètent massivement leur assurance-vie en euros, pour ensuite réinvestir dans des livrets qui deviennent plus intéressants avec la forte inflation.
Dans les faits, cette menace ne s’est pas encore réalisée. Les rachats d'assurance vie s’élèvent à 68,1 milliards d’euros l’année dernière, un chiffre légèrement en dessous de la moyenne observée entre 2011 et 2019. Même si les sorties devraient augmenter cette année, les analystes estiment que les efforts de communication entrepris depuis le début d’année et les pénalités de rachats inciteront les épargnants à réfléchir à deux fois avant de solder leur contrat. Les assureurs restent prudents malgré tout. Selon le dernier stress-test réalisé par l’EIOPA, les sorties massives provoqueraient une pénurie de liquidités chez eux. Ils seraient obligés de céder des actifs liquides pour se couvrir.
Profiter des opportunités offertes par la remontée des taux
En dépit de leurs inquiétudes légitimes, les assureurs voient aussi l’augmentation des taux d’intérêt comme une source d’opportunités intéressantes. Certes, cette remontée entraîne une dépréciation des actifs détenus par les compagnies. La diminution de la valeur est néanmoins compensée par la baisse des provisions techniques obligatoires.
ImportantLes assureurs se retrouvent alors avec une balance excédentaire entre les actifs et les passifs – et cela améliore leur ratio de solvabilité et leur capital disponible.
Des compagnies se sont remises à acheter des emprunts d’État à 3 % ayant une maturité relativement courte. Cette stratégie leur permet de conserver un écart de duration négatif. La dernière étude de l’EIOPA sur le sujet montre que la duration des actifs contrôlés par les assureurs est de 6,3 ans, contre 11,8 ans pour les passifs. Pour les assureurs vie, la période actuelle est propice à l’achat d’obligations mieux rémunérées.