Les contrats d’assurance-vie restent encore le placement préféré des Français. Cette position a été quelque peu fragilisée en 2020, la crise sanitaire ayant entraîné des rachats massifs de la part des épargnants. Dans son évaluation du début d’année, la Banque de France craint que les faibles taux d’intérêt impactent durablement la rémunération de cette épargne.
Après le creux de 2020, celle-ci a retrouvé son dynamisme l’année dernière. Les Français se sont réconciliés avec ces contrats, qui offrent une fiscalité avantageuse et un rendement supérieur à celui des livrets d’épargne classiques.
Sur la forme, la relance de cette solution d’épargne constitue une bonne nouvelle pour l’économie. Sur le fond, ce regain de forme ne colle pas vraiment à la réalité financière des assureurs. Ces derniers promettent toujours des rémunérations élevées, alors que leur taux de rendement réel continue de s’effriter. Ce décalage constitue un risque majeur selon la Banque de France.
Des assureurs préparés à une remontée des taux
Le modèle français de l’assurance vie repose en grande partie sur les obligations d’État, sur lesquelles sont indexés les contrats en fonds euros. Or, ces titres servent un rendement faible depuis plusieurs mois, hormis la brève remontée constatée en ce début d’année. Les taux de l’OAT 10 ans – l’indice de référence – ont même été négatifs une bonne partie de 2021. Cela impacte logiquement le taux de rendement réel des fonds euros et des contrats multisupports en général. Les assureurs l’ont bien compris depuis 2019 et ont ajusté les rémunérations servies aux épargnants.
En moyenne, le rendement des contrats d’assurance-vie a reculé de 0,18 point en 2020. Ce changement a permis aux assureurs de constituer des réserves financières en prévision d’une augmentation plus ou moins longue des taux d’intérêt, qui les obligeraient à verser des rémunérations plus élevées aux épargnants. Pour se parer à cette éventualité, les assureurs ont aussi augmenté la PPB ou Provision sur la Participation aux Bénéfices. La part de cette provision représente 5,1 % des encours en 2020.
Grâce à ces choix stratégiques, les compagnies d’assurance disposent d’une réserve financière suffisante, comparable à trois années pleines de revalorisation, pour faire face à :
- L’émergence de nouveaux produits d’épargne, plus compétitifs ;
- La remontée brutale des taux d’intérêt.
Néanmoins, ce matelas de sécurité les protège pour une durée limitée seulement. Aux yeux de la Banque de France, cette situation représente un risque « élevé » pour les assureurs.
Des contrats trop dépendants des obligations d’État
Les fonds euros garantis et indexés sur les obligations d’État représentent 80 % du stock de contrats vie des assureurs français. Malgré un léger rebond en janvier, la rémunération de ces obligations reste faible.
Les assureurs ont recours à d’autres obligations anciennes, plus rémunératrices, pour continuer de servir des rendements intéressants aux assurés. Seulement, ces titres anciens arrivent à maturité prochainement . Selon la Banque de France, les obligations qui offraient un taux supérieur à 3 % à l’achat représentent un tiers des obligations à taux fixes dans le portefeuille des assureurs.
La moitié de ces valeurs échoit dans moins de quatre ans. Les assureurs devront acquérir de nouvelles obligations, beaucoup moins performantes, pour reconstituer leurs portefeuilles. Si les taux de l’OAT se maintiennent autour de 0 %, le rendement moyen des assurances-vie en France pourrait descendre à 1 % en 2028. Les sociétés d’assurance auront plus de mal à prélever les frais sur ces contrats et cela pèsera sur leur rentabilité, voire leur solvabilité.